Acte I - Fantaisie théâtrale : « Oh Toulouse, ô mon païs… La chasse immobilière y est ouverte et la parole est à la défense ! »

L’été a frappé à la porte il y a peu, et en ce premier juillet, dans un ciel azur, le soleil brille sur TOULOUSE.

CUJAS trône Place du Salin, le Palais de Justice en perspective, baigné de lumière.

 Palais de Justice de Toulouse - DOMICILIUM chasseur immobilier - chasseur appartement

L’affaire du jour défraie la chronique depuis quelques mois. Du pain béni pour La Dépêche du Midi qui augmente ses ventes quotidiennes et le journal de France 3 Région Occitanie ses audiences.

Il faut dire que la chasse, de façon générale, n’est plus en odeur de sainteté depuis plusieurs années.

La protection de la nature et des animaux la peuplant raisonne à tout va, l’écologie est au centre des débats, l’environnement un enjeu planétaire : il faut sauver la Terre, notre planète bleu… en perdition.

Alors chasser, se revendiquer chasseur… qui plus est en terrain citadin, au cœur de la ville, au beau milieu des habitants et passants !

Inconscience ou folie douce, incongruité ingénue ou provocation délibérée,  nostalgie des temps anciens ou agressivité post-moderne ?

L’heure du verdict approche car au terme du procès qui va débuter les résidents de la cité des violettes - occupants propriétaires ou locataires, tous potentiellement férocement chassés de leur logement ou chassables a minima à en croire l’accusation - vont enfin savoir.

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Fier comme un jeune notaire débutant sa carrière aux termes de son Droit… et de la haute protection de papa (lui-même ayant hérité de grand-papa officier ministériel), l’appariteur s’avance : « la Cour ! »

Madame la Présidente et ses assesseurs prennent place.

La partie civile : trois agences immobilières aux noms évocateurs (SuperAgentImmo, Gold-House et Waouh-Immo), directeurs d’agence en tête représentant leurs petites armées d’agents commerciaux.
Leur conseil, l’avocat Maître Edgard FLOUSE de la ROUBLARDISE, espère obtenir pour ces Sociétés une indemnisation, autant que faire se peut lucrative.
La partie adverse pratiquerait le braconnage immobilier, montrerait une ardeur au travail non conforme aux us et coutumes de la profession immobilière, manifesterait un respect excessif à l’égard du mandant (informations complètes, transparence et objectivité), donc pour le moins suspect dans le milieu transactionnel des biens immobiliers, tout au moins une partie de celui-ci (fort heureusement de plus en plus marginale, mais néanmoins souvent la seule, fâcheusement, retenue par le grand public).

L’accusé : un chasseur immobilier toulousain ayant pignon sur rue, chassant à découvert dans la métropole occitane, expérimenté puisque en chasse d’appartements et de maisons depuis plus de 15 ans.

Défendu par Maître Rose BRIQUE, il entend clamer son innocence, prouver qu’il exerce son activité de chasseur en toute légalité, respectant donc de façon scrupuleuse, notamment, le droit immobilier et le code civil, les différends textes régissant et encadrant son métier de service, à l’image, par exemple, du code de déontologie applicable à certaines personnes exerçant les activités de transaction et de gestion des immeubles et des fonds de commerce.

Le décor est planté, l’ambiance lourde, l’atmosphère pesante… l’immobilier - sommes d’argent enjeux obligent - n’étant pas, en général, source de raison gardée.

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La Présidente (P) : « L’audience est ouverte.
Accusé levez-vous.
Veuillez décliner vos nom, prénoms, âge et profession. »

L’accusée (A) : « Pierre MAISONNEUVE, 43 ans, chasseur immobilier, gérant de la Société NTPV - Nous Trouvons Pour Vous. »

La Présidente (P) : « Vous êtes accusé de chasse immobilière en milieu urbain densifié en période de pénurie de foncier bâti à la vente, et cela quelle que soit la période de l’année et les jours de la semaine.
Les vendeurs traditionnels de biens immobiliers présents devant vous se disent victimes d’une pratique trop novatrice pour être honnête.

Chassant sans discontinuer pour satisfaire au mieux vos clients, vous empiéterez sur leurs platebandes immobilières défendues de hautes luttes de génération en génération.

Qui sont ces clients ? Pourquoi vous font-ils confiance ? »

A : « Madame la Présidente, en guise de préambule, j’avoue ne pas comprendre la raison même de ce procès, la solennité des lieux et du moment, et suis par avance confus de la perte de temps occasionnée pour la Cour.
Reste que si l’évidence transparait à l’issue des débats, alors je me réjouis de vous répondre.

Ma clientèle est constituée d’acheteurs d’appartements ou de maisons, voire de locaux professionnels. Plus exactement des acquéreurs (tous les types de profils me sollicitent : peu importe leur âge, leur situation professionnelle ou familiale, leur localisation géographique, etc.) qui n’arrivent pas à trouver le bien immobilier correspondant à leurs attentes.

Souvent par manque de temps (ou déception d’en avoir trop perdu), quelquefois car ils ne résident pas à TOULOUSE ou dans ses environs, quasi systématiquement car ils sont avides de conseils, aspirent à une expertise objective leur permettant au final d’acquérir un logement (ou tout autre bien immobilier) de façon sereine, à un prix en adéquation avec la réalité du marché.

Bref, l’acheteur qui me mandate veut un service sur-mesure, des échanges constructifs, un suivi constant de son dossier… jusqu’à ce qu’il devienne propriétaire le jour de la signature de l’acte authentique de vente au sein de son étude notariale. »

P : « Vous signez un mandat ? ».

A : « Oui, bien sûr. Véritable professionnel de l’immobilier, j’interviens à ce titre dans le cadre de la loi Hoguet, de son décret d’application… et de toute la législation régissant depuis les acteurs français de la transaction immobilière.
De fait, je suis détenteur d’une Carte professionnelle délivrée désormais par la Chambre de Commerce et d’Industrie de TOULOUSE (précédemment, au début de mes activités immobilières, ma Carte T m’avait été remise par la Préfecture de la Haute-Garonne) et signe impérativement avec ma clientèle des mandats de recherche écrits, enregistrés dans mon Registre des Mandats. »

P : « Humm… et pourquoi cette dénomination de chasseur ?
Selon l’enquête menée en particulier par le Conseil National de la Transaction et de la Gestion Immobilière (CNTGI), ci-jointe au dossier, vous n’êtes pas à proprement parlé armé : aucun fusil, arc, couteau, fronde, pistolet, arbalète, lance, dague ou une quelconque autre arme ou piège n’ont été trouvé dans vos bureaux, au siège de votre Société.
Votre terrain de chasse à ma connaissance est constitué des rues toulousaines et de celles de quelques autres agglomérations attenantes (Blagnac, Colomiers, Tournefeuille, Cugnaux, Cornebarrieu, Pibrac, Léguevin, Beauzelle, Fenouillet, Saint-Alban, Aucamville, L’Union, Saint-Jean, Launaguet, Balma, Pin-Balma, Montrabé, Quint-Fonsegrives, Saint-Orens, Auzielle, Labège, Escalquens, Ramonville-Saint-Agne, Castanet-Tolosan, Auzeville-Tolosane, Vieille-Toulouse, Vigoulet-Auzil, Portet-Sur-Garonne, Villeneuve-Tolosane, Pinsaguel, Roques, etc.) et en aucune manière des champs, prairies, bois et forêts du département.
Pour finir, votre gibier n’est ni à plumes, ni à poils, et, que je sache, vous ne recourez pas à un chien pour flairer et pister les domiciles que souhaitent acheter vos mandants ! »

A : « Madame la Présidente, notre profession dédiée aux acquéreurs est née il y a une trentaine d’année environ de l’autre côté de l’Atlantique. Et ses importateurs sur le territoire national ont, à l’époque, en écho à la dénomination américaine, retenu cette appellation de chasseur immobilier.
Je porte aussi le nom de chasseur d’appartement ou chasseur d’Appart (en écho à des émissions ou jeux télévisés qui n’ont pourtant quasiment rien avoir avec le sérieux de notre profession) ou encore, par vulgarisation sémantique, néologisme, déclinaison professionnelle imagée ou figure de style-onomatopée celui de "chasseur Immo", "dégoteur immobilier", "détective immobilier" ou "chasseur ImmOh" (liste non exhaustive tant il faut trouver sa place, se démarquer, dans un environnement désormais concurrentiel). Pour finir s’agissant de cette carte d’identité nominative, les formulations plus classiques de consultant immobilier, chercheur immobilier ou bien (énoncé moderne un peu fourre-tout) de coach immobilier sont de temps à autre usitées, ce qui s’avère moins guerrier il faut l’avouer… et peut-être plus rassurant à vos yeux.

Notre territoire de chasse, en effet, est essentiellement citadin même s’il nous arrive de rechercher des maisons en zone plus ou moins rurale, dans des villages relativement éloignés de la métropole toulousaine.

Enfin, notre « gibier », c’est exact,  ne court pas ou ne vole pas !
Il n’est question, en la matière, que d’appartements (toutes typologies et surfaces confondues : T1, T2, T3, T4, T5, T6, etc.), de toulousaines anciennes ou de demeures contemporaines, de maisons d’architecte ou d’immeubles pour investisseur, de chartreuses ou d’hôtels particulier, de parkings et garages, de fonds de commerce, de bureaux ou autre locaux professionnels, etc.
Des habitations en bon état ou, au contraire, nécessitant des travaux. Des résidences principales ou secondaires. Des biens atypiques ou empreints de classicisme. Des logements vendus vides ou loués, etc. »

Au milieu de cet exposé, la sonnerie d’un portable retenti… celui du directeur de l’agence Waouh-Immo.
Confus, ce dernier maudit l’appareil… (hypocritement en fait car constamment greffé à sa main, son Iphone - dernière génération cela va de soi - en est en réalité le continuum « naturel » pour ne jamais rien perdre de la vie sociale artificielle que lui impose ses Maîtres Facebook et Instagram.
Moyen à la mode d’exposer des appartements et maisons à vendre, il dépose aussi pèle mêle - la confusion des genres où tout est mis sur le même plan n’est pas un soucis - sur ces outils de communication tentaculaires, des photos de ses enfants - forcément souriants et épatants -, des instantanés de week-end arrosés entouré de ses vrais « amis » - mais tous ceux, innombrables et parfois inconnus, de son compte FB ou son profil Insta méritent pareillement à ses yeux de connaitre sa vie privée -, des messages tarte à la crème en faveur de la paix dans le monde et visant à sauver les chiens perdus, des pensées indigentes contre le terrorisme et les grèves de fonctionnaires, pour crier au loup tous les cinq ans et fêter en cœur avec ses collègues les victoires du Stade Toulousain… Sous le prétexte d’un instrument de travail, tel est ce patchwork égocentrique rythmé par des émoticônes réducteurs de pensée : un inventaire à la Prévert, mais sans la poésie).

Il faut dire que la musique du générique « Dallas » - et son univers impitoyable - qui vient perturber l’audience, si elle fait sourire l’assistance, agace passablement Madame la Présidente.

Exaspérée, cette dernière foudroie du regard le propriétaire du téléphone et invite Monsieur Pierre MAISONNEUVE à poursuivre.

A : « En synthèse, tous les types possibles de biens immobiliers sont concernés par les recherches de NTPV (Nous Trouvons Pour Vous) dans la mesure où l’acquisition envisagée se révèle être cohérente, viable.

Et notre seule arme pour estimer cette viabilité, puis dénicher la « perle rare » espérée, se résume en un mot : travail. »

P : « Donc une arme en principe inoffensive ; enfin nullement pour vos clients si vous visez juste - et cela semble se vérifier à en croire les abondants témoignages en votre faveur versés au dossier par ceux qui vous ont engagé -, ni, cela va s’en dire, pour vos trois détracteurs du jour…

Avant d’en tirer d’éventuelles conclusions concernant ces derniers, veuillez nous préciser en quoi consiste ce travail, qu’elles sont les qualités requises pour prétendre à ce statut de chasseur en immobilier et, le cas échéant, de bon chasseur. »

A : « Je dirai, Madame la Présidente, l’écoute pour bien comprendre ce que désirent les acheteurs qui me mandatent, l’expertise, la connaissance fine du marché pour évaluer la faisabilité de leur projet, le conseil pour les orienter si besoin, la patience et la persévérance pour chasser sans discontinuer et, in fine, dénicher leur futur home sweet home.

Bien chasser dans mon domaine immobilier implique donc du savoir-faire et de l’expérience, suppose d’être animé par une logique de service à toute épreuve. »

P : « La situation me parait assez claire.
Maître FLOUSE de la ROUBLARDISE (F de la R) qu’avez-vous à nous dire ? »

Cherchant à se donner de la consistance, F de la R se lève lentement, puis de sa voix rocailleuse aux accents du sud-ouest (versant pyrénéen le plus sauvage), assène ironiquement : « Mes clients sont comme les nobles lions. Ils ne chassent pas Madame la Présidente, ils dorment - enfin, dormiraient à en croire notre chasseur en immobilier - attendant que la proie vienne à eux. »

Bruissement dans la salle d’audience…

« Silence ! » s’exclame Madame la Présidente. « Poursuivez Maître sur ce terrain me semble-t-il, néanmoins, glissant ».

F de la R : « Trêve de plaisanterie (accompagné d’un effet de manche digne des plus grandes assises). Qui est ce prétendu chasseur, quelles sont ses aptitudes pour la transaction immobilière, ses faits d’armes et trophées en quelque sorte si nous devions filer la métaphore ?
Est-il besoin de rappeler que les agences SuperAgentImmo, Gold-House et Waouh-Immo sont la fine fleur du marché immobilier toulousain.
Certes, vous trouverez ici ou là certains mécontents, mais les clients de nos jours sont tellement exigeants et si souvent capricieux, désireux d’une prestation qualitative sans avoir forcément les finances adéquates. »

Nouvel émoi dans l’assemblée… composée entre autres, logiquement, de vendeurs et acquéreurs potentiels.  

F de la R poursuit : « Oui, leurs agents commerciaux changent régulièrement. Des mauvaises langues diront qu’ils sont pressurisés et ne parviennent pas à vivre décemment de leur activité. Mais la jeunesse aujourd’hui est à la fois si paresseuse et naïve : quelle idée de croire que l’on peut gagner facilement et rapidement de l’argent en vendant appartements ou maisons. »

Et d’ajouter un brin sarcastique : « Quand bien même il chaaaasse, l’accusé ne saurait me démentir. »

P : « Maître Rose BRIQUE (R B), nous vous écoutons. »

R B : « Mon confrère a tellement raison…C’est, à l’inverse, parce qu’il effectue un travail consciencieux et rigoureux que mon client, Monsieur Pierre MAISONNEUVE, gagne honorablement et légitimement sa vie, tout comme du reste l’ensemble du personnel qu’il emploi au sein de sa Société NTPV (Nous Trouvons Pour Vous), formant ainsi une équipe soudée et efficace de chasseurs immobiliers. »

F de la R : « Allons, donc ! Une chasse en équipe à présent. Une battue donc ! Et pourquoi pas un Safari… pour un véritable carnage immobilier ! »

Bien qu’ayant l’habitude des envolées théâtrales et occasionnellement comiques de l’avocat toulousain, la greffière se demande cette fois si elle doit vraiment prendre note.

Et Madame la Présidente, elle, de le reprendre : « Vous êtes la preuve vivante Maître F de la R que le ridicule ne tue pas… mais un minimum de retenue ne saurait nuire.  
Certes, nous sommes ici au pays du rugby roi où « si tu cognes, tu gagnes », où « même les mémés aiment la castagne » a pu chanter l’éternel Claude NOUGARO local ; il n’en demeure pas moins que la sérénité - à défaut de pertinence - doit animer les débats.
Maître R B poursuivez s’il vous plait. »

R B : « Madame la Présidente, le seul tort de Monsieur Pierre MAISONNEUVE et de ses employés, experts en recherche immobilière ciblée (tous enregistrés, cela va de soi, auprès de la CCI de TOULOUSE et formés comme il se doit conformément aux obligations fixés par la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR), est d’œuvrer efficacement pour leurs clients.

Et pour tout dire - l’accusation en est ainsi d’autant plus surprenante - la très grande majorité des agences immobilières classiques de la place toulousaine collabore couramment avec celui que j’ai ici l’honneur de défendre. »

P : « C’est-à-dire ? »

R B : « Au niveau immobilier, la collaboration ou partenariat, aussi appelée inter-agence ou inter-cabinet, consiste entre professionnels de la transaction de partager les biens qu’ils détiennent en portefeuille et/ou les clients qu’ils gèrent ; cela bien évidemment dans l’intérêt de ces derniers, qu’ils soient vendeurs ou acquéreurs.

Seules de rares agences sont réticentes, préférant garder leur mandat comme un trésor de guerre dans l’espoir de percevoir une rémunération maximale… quitte à faire perdre du temps aux propriétaires leur ayant confié maison ou appartement, voire même à ne pas vendre en attendant de faire baisser le prix du mandat qu’ils ont « rentré » pour employer le jargon de la profession. »

L’accusation s’agite, manifeste un tel mécontentement que la Présidente menace de suspendre l’audience et de faire évacuer la salle… elle-même en début d’ébullition face à ces révélations.

Peu à peu, le calme revenant, R B poursuit : « Madame la Présidente, j’ai lu sur votre visage l’étonnement, pour ne pas dire une certaine stupéfaction, en entendant mes propos. Mais c’est pourtant bien ainsi que raisonnent encore quelques vieux lions… si vous m’autorisez à reprendre les mots de mon confrère.

Pour eux, mais eux seuls heureusement (puisque la plupart des agences immobilières ont largement évolué, ne serait-ce qu’en raison de l’apparition d’internet, un nouveau territoire immobilier, si vaste qu’il était alors impératif de modifier ses habitudes transactionnelles sous peine peu à peu de disparaître), la notion de service n’est point l’alpha et l’oméga de leur métier.
La clé de voute de leur pratique immobilière, son horizon indépassable porte le nom de commission ou d’honoraires.

Résultat des courses, à l’image des grands fauves de la savane africaine - qui eux sont vraiment sauvagement chassés -, ces agences immobilières encore engoncées dans des procédés commerciaux d’un autre temps périclitent quasi inexorablement.

Et c’est là finalement, très certainement, la raison de ce procès, de cette accusation injustifiée.

Le « chasseur » de mandat de vente qu’est en fait (sans même en avoir vraiment conscience) l’agent immobilier classique tente - ici - de chasser (pour ne pas dire expulser) de son territoire immobilier un concurrent efficace : le chasseur immobilier qui n’est avant tout, vous l’aurez compris, qu’une aide salvatrice pour les acquéreurs. »

P : « En schématisant, il y aurait donc le chasseur immobilier - modernité oblige - offrant une prestation de service, chassant en finesse (les biens), toujours à l’affut, prônant une filature vertueuse, et l’agent immobilier, vendeur à l’ancienne, chassant grossièrement (les propriétaires), peu scrupuleux, mué par une logique quantitative. »

R B : « La situation n’est pas aussi claire, la zone de chasse aussi bien délimitée ; les qualités ne sont pas d’un côté et les défauts de l’autre.
Mon client - tous ceux qui l’ont mandaté depuis des années en attestent officiellement - est un excellent chasseur de biens, respectueux de son environnement… comme il existe de très nombreux agents immobiliers intègres et efficaces, tout aussi respectueux du leur.
D’ailleurs, pour mener à bien leurs missions respectives, ces deux types d’acteurs du marché immobilier coopèrent, nous l’avons vu, très fréquemment entre eux.
Véritables partenaires, ils évoquent leurs dossiers afin de satisfaire au mieux leurs clients respectifs : acheteurs dans un cas et vendeurs dans l’autre.
Mais il existe aussi, nature humaine (complexe) oblige, de piètres chasseurs. »

P : « Allons donc ! »

Sortant de sa torpeur, F de la R réagit : « Enfin, nous y arrivons… »

R B : « Cher confrère, vous ne croyez pas si bien dire.
Comme dans toutes activités humaines, certains professionnels (tout au moins arguant l’être, se parant abusivement de cet attribut) agissent sans scrupule, ou trop peu ; soit par incompétence, soit par malhonnêteté… le résultat étant somme toute le même pour leurs clients : déplorable. »

P : « Précisez Maître, l’accusation est grave. »

R B : « Quelques prétendus chasseurs immobiliers ne sont que des agents immobiliers traditionnels déguisés, donc n’effectuant en aucune manière un authentique et régulier service de recherche immobilière.
Ils se contentent simplement de proposer à leurs prospects - captés via une publicité aguichante, une page sommaire de leur site internet ou un banal post sur les réseaux sociaux - leur stock de biens à vendre.
Pire, il peut s’agir de personnes s’autorisant à faire de l’intermédiation immobilière sans Carte Professionnelle, donc en toute illégalité... exactement comme il en existe, depuis si longtemps, du côté de la vente immobilière avec de prétendus agents immobiliers. »

Reprenant son souffle (son confrère ses esprits et Madame la Présidente un verre d’eau…) R B poursuit : « Madame la Présidente, la confusion réside en ce point et de fait l’accusation s’en trouve infondée.
Nos adversaires se trompent de cible ou font sciemment un amalgame entre les escrocs de tous poils intervenant illégalement sur le marché de la transaction immobilière et les chasseurs immobiliers… à seule fin - injustement - de mieux discréditer ces derniers.
Ils voudraient que le marché immobilier des professionnels de la transaction ne soit qu’une chasse gardée… mais pour eux ! Donc que Monsieur Pierre MAISONNEUVE, ses collaboratrices et collaborateurs, n’y ait pas accès. »

P : « Cette argumentation est lourde de sens.
Maître F de la R, qu’en est-il selon vous ? Votre confrère ne serait-il pas un peu dans le vrai ?
Vos clients agents immobiliers ne seraient-ils pas en définitive, à leur manière, des chasseurs… en l’occurrence désirant se créer une réserve de chasse immobilière privée ? »

F de la R : « C’est un comble… l’accusé devient accusateur et mes clients se voient à présent accolé le terme de chasseurs ! »

P : « Vous parlez fort Maître F de la R, mais n’argumentez guère… »

Saisissant l’occasion, Maître R B, lui-même quelque peu railleur, cherche à enfoncer le clou : « Oui, chasseurs de… pigeons !
N’est-ce pas là, en effet, l’étiquette souvent accolée à bon nombre d’agents immobiliers aux pratiques pour le moins douteuses ? »
   
P : « Maître R B, un peu de hauteur… Ne généralisez pas et, en toute hypothèse, quel intérêt de tirer sur une ambulance ?
Pourriez-vous plutôt poursuivre vos explications et, notamment, revenir sur la distinction entre le bon et le mauvais chasseur (de biens immobiliers cela s’entend, pas de pigeons !).
En quoi l’accusé peut-il être/doit-il être classé dans la première catégorie ?
Comment séparer sur ce terrain immobilier le bon grain de l’ivraie ? »

R B : « Madame la Présidente, je pourrai plaider que mon client Monsieur Pierre MAISONNEUVE joui d’une excellente réputation, venant tant de ses nombreux clients gérés depuis des années - lesquels recommandent régulièrement son équipe (et n’est-ce pas là une preuve incontestable de savoir-faire, bien faire ?) - que de la majorité de ses confrères agents immobiliers qui, n’en déplaise aux trois désolantes agences accusatrices, collaborent ensemble de façon tout aussi constructive qu’habituelle.
Mais ce rappel purement factuel - et les faits sont têtus ! - est-il nécessaire… tant il est avéré, connu et reconnu.

En revanche, je peux vous préciser que mon client est membre du premier Syndicat National des Professionnel de l’Immobilier (SNPI) comme, du reste, ses détracteurs présents à la barre… on ne sait donc plus trop pourquoi !

Il appartient également à la Fédération des Chasseurs Immobiliers - désignée aussi par l’acronyme FCI - qui a le mérite de réunir sur le territoire national français les véritables chasseurs immobiliers. »

P : « Mais encore ? Qu’est-ce que ce véridique chasseur de biens et cette organisation fédérative ? »

R B : « En matière d’immobilier, le chasseur sachant chasser est tout simplement un professionnel de la transaction qui exerce à titre principal et quasi exclusif la recherche d’appartement ou de maison.

Expert d’un marché immobilier local, il propose cette prestation immobilière spécifique en s’engageant à honorer fidèlement la Charte déontologique de la FCI protectrice des intérêts des clients acquéreurs le mandatant et, bien sûr, en respectant strictement l’ensemble des textes législatifs et réglementaires qui encadrent les métiers de la transaction immobilière.

A cet égard, les membres de la Fédération des Chasseurs Immobiliers sont obligatoirement détenteur d’une Carte T, forcément missionnés par un mandat écrit et inévitablement rémunérés au seul résultat (toute autre forme de rémunération - de type frais de dossier, frais de reportage, etc. - étant absolument interdite), de facto si, et uniquement si, leurs clients deviennent officiellement propriétaires (moment symbolisé par la remise de clés chez le notaire).

Le fait d’appartenir à cette Fédération de chasseurs immobiliers, d’avoir pu y adhérer pour ceux qui se présentent comme chasseurs, est un gage de sérieux, un label de qualité… et donc par la même de sécurité pour les acheteurs qui envisagent de solliciter un spécialiste de la recherche immobilière. »

P : « Trouvez-vous quelque chose à redire Maître F de la R ? »

« La situation serait peut-être plus limpide pour tout un chacun si l’activité de chasseur immobilier était reconnue en tant que telle, comme profession à part entière.
Mes clientes - qu’il s’agisse des enseignes SuperAgentImmo, Gold-House ou Waouh-Immo - peuvent aussi signer des mandats de recherche et, au demeurant, il leur arrive de le faire.
Pour autant, leur action première est de satisfaire les propriétaires qui leur ont confié un logement à la vente. »

P : « Allons bon, pourquoi signent-elles, elles aussi, des mandats de recherche ? »

F de la R : « C’est le cas essentiellement quand un particulier n’est pas enclin à leur faire confiance, craint de s’engager contractuellement via un mandat de vente.
Dans ce cas de figure, elles « amènent » leur prospect potentiel capté sur un autre bien qu’elles ont à écouler (mais ne correspondant pas en fait à son cahier des charges) visiter celui du propriétaire réticent à les accueillir, tout au moins à leur signer un quelconque contrat, en lui indiquant qu’elles n’en ont pas besoin puisqu’elles détiennent un mandat de recherche.
Mais c’est là une hypothèse assez marginale tant les agences que j’ai l’honneur de défendre sont parfaitement opérantes. »

P : « Opérantes, soit… mais mécontentes - nous ne serions pas autrement réunis… à votre requête - de la présence d’autres acteurs de la transaction immobilière, pourtant a priori complémentaires si j’en crois les débats de ce jour.
Ou, plus précisément, qui devrait l’être au profit de tous, en l’occurrence pour elles-mêmes et leurs homologues chasseurs, mais surtout pour les propriétaires vendeurs et les futurs acquéreurs.

Bon… le dernier mot à la défense. »

R B : « Je ne voudrai pas accabler les trois agences immobilières - quelque peu cocasses et dépassées - finalement en chasse… de chasseurs immobiliers, acteurs désormais centraux du marché immobilier.

Espérons au contraire que ce procès aura permis de les faire évoluer positivement. De sorte qu’au lieu de rester retrancher dans des mœurs immobilières d’un autre temps, elles auront compris - à l’image de la majorité de leurs consœurs agences immobilières locales et nationales - que les chasseurs immobiliers ou chasseurs d’appartements sont avant tout des partenaires œuvrant à des projets immobiliers qualifiés ; donc de facto une opportunité pour les propriétaires les ayant mandatés afin de commercialiser de façon optimale leurs biens.

Une vente immobilière n’est-elle pas en effet, fondamentalement, la rencontre de deux intérêts… et indirectement de trois ou de quatre lorsque cette rencontre est permise par un ou des intermédiaires diligents et compétents ? »

P : « Maîtres, Messieurs, la Cour a bien pris note de ces différentes explications et vous en remercie. L’audience est levée et le délibéré sera rendu début septembre, juste après la période estivale à venir. »

E. MASSAT - Chasseur Immobilier Domicilium

Publié le vendredi 01 juillet 2022