Information légale et conseil pratique : l’obligation de débroussailler son terrain.
Notre rôle au quotidien de chasseur immobilier ne va pas sans une activité permanente de conseils, de suivi et d’information - entre autres juridiques - prodigués aux personnes qui nous mandatent.
Le thème du présent billet, qui concerne une partie de nos clients - des acheteurs en quête d’une maison, ici surtout en deuxième ou troisième couronne autour de TOULOUSE, voire au-delà pour une résidence secondaire dans ce cas -, en est une illustration.
Débroussailler son terrain : une obligation renforcée par l’urgence climatique.
Le dérèglement climatique, synonyme d’un réchauffement généralisé de la planète, a pour conséquence, entre autres, l’intensification des périodes de sécheresse, l’asséchement profond des sols, et avec eux une série de risques associés, notamment l’augmentation des incendies, tout particulièrement l’été.
Les incendies en France.
Les chiffres en la matière montrent à quel point il convient de prévenir et lutter, anticiper et agir avec diligences… d’autant plus que ces actions combinées sont porteuses de résultats positifs.
En effet selon les données du Ministère de la Transition Écologique et de la Cohésion des Territoires parues en janvier 2024, après une année 2022 d’une ampleur exceptionnelle puisque 72000 hectares ont été brûlés suite à 14000 départs de feux enregistrés (
nécessitant souvent des moyens d’interventions très lourds et couteux, à l’image des canadairs), 2023 a vu 14400 hectares détruits par le feu pour 16000 départs d’incendie comptabilisés.
De fait, alors que les incendies ont connu une hausse significative en 2023 par rapport à 2022 (
12% en plus), le nombre d’hectares brûlés a pourtant, lui, été divisé par cinq.
Preuve en est que les politiques mises en place par les gouvernants au niveau de la sphère publique ont eu des effets bénéfiques (voir infra) et qu’il convient de les renforcer en mobilisant la sphère privée, en sensibilisant les particuliers, quand ce n’est pas en les contraignant à agir et si besoin à les réprimander en cas de manquement à leurs obligations… d’où le renforcement de l’arsenal juridique pour combattre les incendies et leurs conséquences, dont l’obligation de débroussaillement.
Les contraintes imposées à certains propriétaires : prévention et sanctions.
Afin de contenir et surtout juguler en amont autant que possible les feux destructeurs, majoritairement d’origine anthropique (environ 90% des départs de feu français sont causés par l’homme, principalement par imprudence, les 10% restant résultent de la foudre), les pouvoirs publics ont pris au milieu des années 80 des mesures figurant de façon générale dans le Code forestier et sont conduits depuis à les consolider eu égard au contexte écologique précité.
Le débroussaillement et la loi.
Penser en termes d’obligations, le débroussaillement est instauré en France par la loi n° 85-1273 du 4 décembre 1985 relative à la gestion, la valorisation et la protection de la forêt (JORF n°282 du 5 décembre 1985).
Son champ d’application et ses modalités seront précisés par la loi n° 2001-602 du 9 juillet 2001 d’orientation sur la forêt (JORF n°159 du 11 juillet 2001).
Il est depuis défini à l’article L131-10 du Code forestier… et modifié pour coller toujours plus aux contraintes qu’imposent le changement climatique et ses conséquences sur le vivant… à préserver et protéger autant que faire se peut.
Tel fut le cas récemment avec la loi 2023-580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie (suivi d’un décret d’application pris immédiatement en suivant le 1er août 2023 : décret n° 2023-706 relatif aux obligations de débroussaillement, paru au JORF n°0177 le 2 août 2023) qui vient consolider le dispositif existant d’information des acquéreurs sur les obligations de débroussaillement et pour les terrains concernés soumet leur vente au respect de ces obligations.
Nous l’évoquons aujourd’hui, quelques mois après sa promulgation (au Journal Officiel « Lois et Décret » - JORF n°0159 du 11 juillet 2023), car pour les personnes concernées (celles qui résident en général près de bois, de forêts, de plantations ou des zones de reboisements), le meilleur moment pour débroussailler s’avère être le début d’année et la fin de l’époque hivernale actuelle, lorsque la végétation est encore en « dormance » (la taille des végétaux qui ont perdu leurs feuilles est plus aisée et leur coupe ne perturbe pas les cycles futurs de reproduction de la faune et de la flore).… avant de « renaitre », se revivifier au printemps et gagner alors du… terrain.
Période « idéale » contrairement aux idées reçues, tout au moins aux idées que l’on pourrait se faire en la matière liées à l’entretien des jardins et terrains qui débutent le plus souvent au printemps et se poursuivent de juin à septembre/octobre… dans une logique alors d’embellissement et de mise en valeur de ses espaces verts, jardins d’agréments, parcs, etc. qui n’est, à l’évidence, pas celle prioritairement visée ici.
Concrètement qu’est-ce que le débroussaillement ?
Débroussailler est une action humaine de nettoyage, de suppression des masses végétales encombrantes de toute nature (il ne s’agit pas toutefois d’un défrichement qui, lui, s’avère être un changement total et radical de la nature d’occupation du sol).
Le débroussaillement consiste donc à éliminer les herbes et feuillages excessivement importants, à combattre les taillis et les buissons trop denses, à maitriser les broussailles et les branchages envahissants, à limiter l’importance des haies, à couper la végétation basse et l’ensemble des éléments naturels morts, à élaguer les arbustes et les arbres (notamment pour une mise à distance des branches d’un arbre à un autre et/ou à une habitation), à abattre certains arbres (morts ou « mourants »), à éloigner d’un logement les réserves de bois tout en les protégeant, de façon plus générale à évincer les végétaux et déchets entreposés sur ses parcelles de terrains, à se débarrasser des résidus de tonte, de broyage ou de compostage, ainsi que des aiguilles de conifères jonchant le sol, à assainir les gouttières et les toitures.
L’objectif est donc de mieux réguler les espaces limitrophes entre les bois, forêts, la nature sauvage et les zones urbanisées, habitées ou exploités, de diminuer autour des habitations et autres constructions de certains propriétaires le risque de départs de feux par une politique de réduction de la biomasse plus ou moins facilement inflammable (
véritable combustible en soi, les herbes mortes et sèches se révèlent être, tout particulièrement, source de grand danger en la matière), de minimiser l’intensité des incendies qui se seraient malheureusement déclarés, tout en freinant leur propagation dévastatrice si l’extinction naissante du foyer ou des foyers concernés ne pouvait immédiatement aboutir.
Un terrain débroussaillé est en effet, corrélativement, plus facile d’accès aux pompiers et aux divers services de secours, leur permet de mieux protéger et sécuriser les habitations en danger, la vulnérabilité des personnes et de leurs biens face au péril des flammes.
Qui est concerné par l’obligation de débroussaillement ?
La loi française distingue les zones rurales et les zones urbaines.
Dans le premier cas l’obligation de débroussailler vise le propriétaire d’une construction, d’un chantier ou d’une quelconque installation.
Dans le second cas, où la densité de population est plus importante et de fait les risques d’incendie associés et de dégâts matériels et/ou humains majorés, cette obligation vise le propriétaire de tout terrain, qu’il soit construit ou non.
Le locataire du terrain visé par l’obligation de débroussaillement ou bien encore un tiers, un professionnel assermenté, peuvent-ils débroussailler en lieu et place du propriétaire ?
Dans les deux configurations/découpages géographiques précités (
milieu rural ou urbain), un locataire en place peut débroussailler le terrain qu’il occupe dans la mesure où une clause du bail le prévoit ; qu’il s’agisse du reste d'un bail de droit commun, d’un bail commercial, d’un bail professionnel ou d’un bail rural.
S’agissant d'un bail classique d’habitation, si le travail de débroussaillement s'apparente à de l'entretien courant de l’habitat, au maintien en état débroussaillé, il peut être à la charge du locataire.
Et de la même manière, que ce soit en zone urbaine ou rurale, un professionnel peut se charger du débroussaillement du terrain concerné et le maintenir en état débroussaillé.
A cet égard, il est financièrement intéressant de savoir que sous certaines conditions - de revenus notamment - un propriétaire peut bénéficier d’un crédit d’impôt s’il emploi une personne en ce sens ; en l’occurrence une ou un salarié à domicile (
les dépenses engagées dans ce cadre étant plafonnées à 5000 Euros/an par foyer fiscal), que ce soit en direct ou par le biais d’un service à la personne mis en place par une association, une entreprise ou un organisme agréé.
Débroussaillage obligatoire autour des maisons et de leurs dépendances, ou bien encore de divers fonciers bâtis… mais sur quel périmètre, à quelle distance des lieux de vie ou de travail ?
La « ceinture de sécurité » qu’offre un débroussaillement opérant autour des biens, de l’environnement dont on est propriétaire, varie quelque peu selon que l’on se trouve en milieu rural ou en milieu urbain.
En zone rurale : sauf arrêté municipal ou préfectoral modifiant la réglementation de principe (nous vous convions à cet égard de vérifier précisément ce qu’il en est dans votre commune auprès des services compétents de la mairie ou ceux de la préfecture de votre Département), si le terrain se trouve à moins de 200 mètres d’un bois ou d’une forêt, l’obligation de le débroussailler et de le maintenir comme tel doit s’opérer autour de l’habitat et des annexes de celle-ci sur une profondeur de 50 mètres (ou 100 mètres si le maire ou le préfet prennent une décision en ce sens, singulièrement en cas de plan de prévention des risques d'incendie de forêt).
En matière de voirie par ailleurs, carrossables ou pas, le ou les sentiers, chemins ou routes (privatifs dans les différents cas) qui donnent accès à ce terrain se doivent également d’être débroussaillés autour de l’habitat sur une distance de 10 mètres de part et d’autre de la voie concernée.
Il est à noter que si le débroussaillement imposé dépasse les limites de sa propriété (que celle-ci soit dotée ou pas d’une clôture - grillage, palissade, mur ou autre -, soit fermée ou ouverte), le propriétaire voisin doit être informé de l’opération de débroussaillage à venir sur son propre terrain.
Laquelle action ne peut ensuite intervenir qu’en vertu d’une autorisation de sa part d’accéder à sa propriété (permission valable pour une durée de trois ans).
Si tel n’est pas le cas - ou bien si ce voisin revient sur l’autorisation qu’il a le cas échéant donnée -, l’opération de débroussaillage exigée demeure à sa charge et le maire doit alors être averti par vos soins d’une absence de réponse (un délai d’un mois lui est laissé à cet effet) ou de son refus d’autoriser à pénétrer sur son terrain.
En zone urbaine : un distinguo est fait selon que la commune dispose ou non d’un PLU (Plan Local d’Urbanisme) ou d’un document équivalent.
Mais les règles précitées, à l’exception des voies d’accès au terrain précitées (
qui n’ont pas lieu d’être), sont identiques, si ce n’est également une souplesse légèrement plus grande pour les zones urbaines dotées d’un PLU… bien que dans ce cas aussi, même hors des territoires classés à risque d’incendie par la loi, la préfecture peut imposer le débroussaillage d’un terrain jusqu'à 50 mètres autour d’une habitation et quand bien même également cette obligation empiète sur le terrain du voisinage direct.
Par ailleurs, un cas particulier en zone urbaine est à relever : toute parcelle située à la fois en zone U du document d’urbanisme et à moins de 200 mètres d’une forêt (
ou d’une lande ou d’une garrigue) doit être intégralement débroussaillée par son propriétaire, même dans l’hypothèse où elle n’est pas encore construite.
Quels sont les territoires occitans concernés par l’obligation de débroussailler ?
Aux termes de la Loi, classées par régions, puis par départements, plusieurs grands secteurs géographiques du territoire national sont visés - répertoriés en ce sens - par l’obligation de débroussaillement.
Tel n’est pas le cas des autres… même s’il est bien sûr vivement recommandé de débroussailler son terrain quand bien même cette contrainte légale n’existe pas textuellement, tout particulièrement si son habitation se trouve dans un environnement boisé, en périphérie plus ou moins immédiate d’un milieu naturel dense, proche de surfaces agricoles ou de massifs forestiers, etc… autant de périmètres potentiellement à risque.
Pour l’Occitanie - zone régionale qui professionnellement nous intéresse directement - les espaces territoriaux concernés par le caractère obligatoire sont :
- les abords de tous les bois et forêts pour la Haute-Garonne (notre lieu de chasse immobilière de prédilection, le cœur d’activité de notre équipe de chasseurs immobiliers), l’Ariège, l’Aude, le Gers, le Tarn, les Hautes-Pyrénées - cinq départements limitrophes à la Haute-Garonne où, parfois, selon la nature exacte des projets immobiliers envisagés, les zones exactes de recherches de logements convoités, Domicilium recherche appartements et maisons -, la Lozère, le Lot, les Pyrénées-Orientales et l’Aveyron.
- les abords de tous les bois et forêts, sauf ceux des massifs forestiers à moindres risques définis par arrêté préfectoral, pour le Gard, l’Hérault et le Tarn-et-Garonne (là aussi, un département jouxtant la Haute-Garonne où, de fait, une chasseuse ou un chasseur immobilier de notre équipe peut à l’occasion intervenir, accompagner un acquéreur dans son projet d’achat immobilier).
Au sein des grandes zones territoriales imposant dans chaque département l’obligation de débroussaillement, comment savoir si précisément, et à quel degré, son terrain est concerné par celle-ci ?
Afin de se faire une idée un peu plus précise, et cela rapidement - mais une première idée seulement -,
Domicilium vous livre une astuce : la consultation du site gouvernemental de l’Institut National de l’Information Géographique et Forestière qui établit un zonage informatif des obligations légales de débroussaillement, communément désigné sous l’acronyme OLD.
En voici le lien :
https://www.geoportail.gouv.fr/donnees/debroussaillementNéanmoins, si le périmètre visualisable sur la carte en ligne de l’IGN est certes plus circonscrit et ajusté que le zonage départemental légal précité, il ne mentionne pas pour autant spécifiquement les règles à appliquer au cas par cas pour débroussailler correctement tel ou tel terrain.
Aussi, en tant que propriétaire responsable, pour connaitre le contexte local précis dans lequel se trouve son terrain - source d’OLD pouvant légèrement varier (
profondeur exacte du débroussaillement depuis l’habitat, distance à retenir entre les arbres, hauteur d’élagage, etc.) -, appréhender ainsi exactement la teneur du débroussaillage imposé nous obligeant, il convient de s’adresser directement à la mairie ou à la préfecture dont dépend son terrain.
Cela est d’autant plus vrai que si la cartographie de l’IGN recense les territoires soumis à la réglementation OLD sur la base des décrets et arrêtés préfectoraux en vigueur dans les départements, n’étant ensuite élaborée qu’à partir de photographies satellites et/ou de données numériques à la fiabilité incertaine en raison de difficultés matérielles et/ou de visibilité optimale non assurée pour identifier avec certitude certaines typologies de terrains (
quelques massifs boisés, des landes, des garrigues, des zones en coupes rases ou bien défrichées), cette carte ne peut - à ce titre également, d’ordre purement technique - n’être qu’informative.
N’ayant donc pas vocation et ne prétendant pas déterminer le champ exact du zonage où la règle sur les obligations légales de débroussaillement s’applique, ni encore moins la teneur exhaustive de celles-ci,
Domicilium insiste… en recommandant vivement aux propriétaires potentiellement concernés de solliciter les services compétents du maire ou du préfet… dans leur intérêt s’ils sont déjà propriétaires (
recommandation pour la bonne gestion et protection de leur foncier, sa préservation et avec elle celle de l’environnement en général, en vue d’éviter aussi une sanction ; voir infra) et nous consultent, par exemple, pour l’évaluation d’un bien, une mise en vente potentielle à venir… ou pour nos clients qui vont devenir propriétaires, nous ont mandaté en tant que chasseur immobilier afin de leur trouver une maison et souhaitent - légitimement - un maximum d’éléments pour un achat en toute connaissance de cause.
Dans ce dernier cas, plus que de recommandation, c’est d’information qu’il est question… mais, quelle qu’en soit la nature, tellement importante pour un achat immobilier sécurisé… que
Domicilium y consacre toujours - peu importe le sujet et les enjeux - un maximum d’énergie.
Vente et location : quelles obligations en matière de débroussaillement pour le propriétaire vendeur ou bailleur ?
Notre activité de chasseur immobilier et de conseil - inutile de rappeler que les deux sont intimement liés, que l’un ne va pas sans l’autre, que la notion de service qu’ils impliquent constituent même l’ADN de
Domicilium -, nous amène donc à rappeler cette réglementation des OLD à nos clients acquéreurs (
pour leur futur état de propriétaire et les conséquences en résultant)… mais aussi, dans ce contexte de mandat de recherche, aux propriétaires vendeurs que nous sollicitons pour nos mandants puisque, et en toute hypothèse parce que…, les dits vendeurs ont une obligation d’information relative au débroussaillage à délivrer à leur futur acheteur.
En effet, en cas de vente - ou du reste pour une mise en location -, l’obligation de débroussailler le terrain vendu ou loué, et/ou ou de le maintenir en état débroussaillé, doit être délivrée au futur occupant des lieux : le nouveau propriétaire ou le locataire.
C’est l’article L134-16 du Code forestier, modifié par l’article 22 de la loi du 10 juillet 2023, qui le prévoit : «
La mutation d’un terrain, d’une construction, d’un chantier ou d’une installation concernée par une obligation de débroussaillement ou de maintien en l’état débroussaillé résultant du présent titre est conditionnée au respect de cette obligation sur ce terrain ou aux abords de cette construction, de ce chantier ou de cette installation, dans la limite de la propriété sur laquelle cette construction, ce chantier ou cette installation est installé. Un décret précise les modalités d’application du présent alinéa, notamment les modalités de contrôle du respect de l’obligation de débroussaillement ou de maintien en l’état débroussaillé.
En cas de mutation, le cédant informe le futur propriétaire de l’obligation de débroussailler ou de maintenir en état débroussaillé ainsi que de l’existence d’éventuelles servitudes résultant des dispositions des chapitres II à IV du présent titre.
A l'occasion de toute conclusion ou renouvellement de bail, le propriétaire porte ces informations à la connaissance du preneur ».
Et, en pratique, le législateur a prévu que cette information des acquéreurs ou des locataires serait intégrée à compter du 1er janvier 2025 dans l’état des risques et pollutions, comme ce fut le cas pour la sismicité, la pollution des sols, le radon, les risques naturels, miniers ou technologiques… faisant de cet ERP, en annexe d’une promesse de vente, puis de l’acte de vente définitif d’un bien immobilier (
foncier bâti ou parcelle nue), un document toujours plus important pour l’acquéreur, partie intégrante du DDT, le dossier de diagnostics techniques immobiliers obligatoire.
In fine, ne serait-ce qu’eu égard aux enjeux en cause, le non-respect de l’obligation de débroussaillement n’est pas, loin sans faut, sans conséquence pour le propriétaire qui ne s’y soumettrait pas, ne la respecterait pas.
Les sanctions en matière de non-respects des règles de débroussaillement
Etant précisé d’une part que le maire est responsable du contrôle de la mise en œuvre des obligations légales de débroussaillement (OLD) aux abords des constructions et équipements de toute nature (
soit directement, soit le cas échéant en confiant se contrôle à un agent de l’ONF) et d’autre part que le préfet peut le remplacer en cas de carence, le nouveau dispositif de débroussaillage n’aurait guère d’intérêt et surtout d’efficacité s’il n’obligeait pas réellement ses destinataires… d’où une dimension punitive prévue.
Nature humaine oblige… c’est ainsi, une obligation non assortie de sanction pour son non-respect aurait en effet peu de portée.
De sorte que le législateur a prévu (
article L134-9 du Code forestier) qu’en matière de débroussaillement, une fois le contrôle exercé (
l’habitant pouvant en être prévenu ou pas) la commune - ou bien les services compétents de la préfecture si le maire n’agit pas - peut mettre en demeure, par courrier recommandé avec avis de réception, le propriétaire d’agir dans un délai d’un mois… et lui imposer une astreinte de cent Euros (100 €) maximum par jour de retard.
Il est à noter que le montant total des sommes exigées est fixé à cinq mille Euros (5000 €) maximum et que la mairie par la voie de son représentant peut également accorder une exonération partielle ou totale des frais si le propriétaire justifie qu’il n’a pas pu respecter son obligation en raison de circonstances extérieures.
Le maire a aussi le pouvoir de mettre en place un débroussaillage d’office aux frais du propriétaire contrevenant et peut infliger à ce dernier une amende administrative d’un montant de cinquante Euros (50 €) maximum par m2 non débroussaillé (
article L135-2 du Code forestier).
En outre, conformément à l’article R163-3 du Code forestier (
modifié par l’article 2 du décret du 1er août 2023 sus-évoqué), le propriétaire négligeant ou récalcitrant encourt une sanction pénale devant le Tribunal correctionnel, en l’espèce le paiement d’une amende allant de sept-cent-cinquante Euros (750 €) à mille cinq-cents Euros (1500 €), correspondant à la punition prévue pour les contraventions de la 5ième classe.
Par ailleurs, sur la base de l’alinéa 1 de l’article 322-5 du Code pénal, en cas de non-débroussaillement ayant entrainé la propagation d’un incendie à l’origine de la destruction du bien d’un ou de plusieurs voisins, le propriétaire du terrain concerné peut subir une peine d’emprisonnement, précisément une condamnation susceptible d’aller jusqu’à un an de prison, assortie d’une amende de quinze mille Euros (15 000 €).
Sachant qu’en cas de violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, le Code pénal prévoit que les peines encourues sont doublées, soit deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende (alinéa 2 du même article).
Graduant la condamnation à la hausse, cet article 322-5 du Code pénal ajoutant que « lorsqu’il s’agit de l'incendie de bois, forêts, landes, maquis, plantations ou reboisements d’autrui, les peines sont portées à deux ans d'emprisonnement et à 30 000 euros d'amende dans le cas prévu par le premier alinéa, et à trois ans d’emprisonnement et à 45 000 euros d’amende dans le cas prévu par le deuxième alinéa.
Si cet incendie est intervenu dans des conditions de nature à exposer les personnes à un dommage corporel ou à créer un dommage irréversible à l’environnement, les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et à 45 000 euros d’amende dans le cas prévu par le premier alinéa, et à cinq ans d’emprisonnement et à 100 000 euros d’amende dans le cas prévu par le deuxième alinéa.
Si l’incendie a provoqué pour autrui une incapacité totale de travail pendant au moins huit jours, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende dans le cas prévu par le premier alinéa, et à sept ans d’emprisonnement et à 100 000 euros d’amende dans le cas prévu par le deuxième alinéa.
S'il a provoqué la mort d’une ou plusieurs personnes, les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et à 100 000 euros d’amende dans le cas prévu par le premier alinéa, et à dix ans d’emprisonnement et à 150 000 euros d’amende dans le cas prévu par le deuxième alinéa ».
Enfin, selon l’article L122-8 du Code des assurances, si les dommages causés le sont par un incendie, que le logement détruit est celui du propriétaire fautif, que ce dernier ne s’est pas conformé à ses obligations figurant au Code forestier, son assureur est également en droit de lui appliquer une franchise supplémentaire d’un montant pouvant atteindre cinq mille Euros (5 000 €).
Reste que pour éviter les incendies destructeurs, au-delà du corpus juridique imposant des obligations légales de débroussaillement - OLD qui plus est assorties d’un arsenal répressif d’envergure -, le plus simple n’est-il pas de faire preuve au quotidien de bons sens, d’une prudence relevant fondamentalement de l’évidence, d’accomplir des gestes précautionneux somme toute naturels ?
Agir (aussi) en conscience et de façon volontaire plutôt que seulement forcé, sous la contrainte des autorités publiques et la menace d’une sanction, prévenir le danger et anticiper les risques au niveau de ses actions quotidiennes individuelles, mais de concert avec les actions gouvernementales et territoriales d’ampleur fixant un cadre général, tel doit être la voie nous semble-t-il, responsable et civique, pour ne pas subir les incendies et regretter des dommages parfois irrémédiables.
La protection et de la sauvegarde de la nature : enjeux écologiques, préoccupations politiques… au centre desquels le citoyen se doit d’être un acteur majeur.
Point parcellaire d’un politique environnementale globale, l’obligation de débroussaillement n’a de sens que si elle s’inscrit dans une action programmative englobante, un schéma directeur général faisant de la protection et de la sauvegarde de la nature, de la préservation et de l’entretien de l’environnement, la clé de voute de toutes actions, individuelles comme collectives.
Des actions individuelles au quotidien…
Ainsi, en écho aux préconisations de l’Office National des Forêts (ONF), les pouvoirs publics français soulignent régulièrement - par exemple via le site gouvernemental dédié à l’Agriculture - que la préservation du patrimoine forestier, de sa faune et de sa flore (mais cela vaut bien sûr pour tout milieu naturel), que le développement de la biodiversité qui en est un des corollaires, passe par un comportement adapté de ses usagers… devant se muer en citoyens responsables, en véritables écocitoyens.
A cet égard, sur le terrain spécifique du débroussaillement, sa raison d’être fondamentale d’éviter les départs de feux, une série de mesures préventives, de recommandations et d’interdictions sont rappelées à ceux qui se promènent en forêt, longent les routes et chemins proches de zones naturelles denses, ou bien vivent ou travaillent dans ce type de cadre naturel, entourés d’une abondante végétation.
Citons parmi elles (la liste n’étant pas exhaustive) :- éviter, voire - selon les périodes et l’intensité des risques - ne pas allumer de feu ou de barbecue,
- ne jamais jeter au sol de mégots de cigarettes,
- ne pas fumer dans les bois et forêts, et jusqu’à une distance de 200 mètres de ceux-ci, durant les périodes à risque d’incendie définie par arrêté préfectoral,
- ne pas bricoler, réaliser de travaux générant des étincelles,
- ne pas abandonner de matériaux ou produits potentiellement inflammable ou source avec le temps de feux,
- bivouaquer ou camper dans les seuls lieux autorisés à cet effet,
- laisser les axes de circulation forestière accessibles aux secours,
- respecter strictement les périodes autorisées d’accès à des massifs naturels ou des zones naturelles protégées,
- en cas de début d’incendie, prévenir immédiatement les sapeurs-pompiers en composant le numéro 18 (ou le 112 : appel d’urgence européen), tout en s’éloignant de l’axe principal de déplacement du feu et des fumées toxiques qu’il engendre (si possible en respirant au travers d’un linge humide qui en atténue les effets néfastes).
Parallèlement à ses actions individuelles et englobant celles-ci, les inscrivant dans une réflexion écologique globale, c’est autour des incendies une politique publique générale qui est engagée.
…au cœur d’une action collective durable.
Tel est le cas de la défense des forêts contre l’incendie (DFCI) conduite par le Ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire, illustration d’un choix politique volontariste de prévention du risque qui passe par :
- une aide financière pour entretenir et développer en zone forestière les équipements matériels de lutte contre le feu : différents points d’eau, tours de guet, pistes pour circuler (dont des nouvelles pistes spéciales de défense de la forêt), balisages efficients et actualisés, signalétique renouvelée et déployée, zones coupe-feux accrues, etc.
- une gestion durable du parc forestier via une mission d’intérêt général (MIG) de DFCI confié à l’Office National des Forêts favorisant une sylviculture raisonnée, proposant une expertise et des études de reconstitutions des espaces naturels détruits par le feu (lorsque tel est malheureusement le cas) où la dimension écologique est essentielle,
- la création de patrouilles de surveillance (entre autres pour une détection précoce des départs de feux), de contrôle et de première intervention autour de professionnels expérimentés du domaine forestier, en particulier ceux de l’ONF en partenariat avec les sapeurs-pompiers spécialisés de certains Conseils départementaux et des sapeurs-forestiers,
- la mise en place d’équipes pluridisciplinaires de recherche regroupant dans certains départements un sapeur-pompier (SDIS), un membre de l’ONF ou de la Direction Départementale des Territoires (DDT), ainsi qu’un officier de police judiciaire (police ou gendarmerie), afin de mieux identifier les causes des mises à feux humaines et orienter en conséquence des actions de prévention ciblées.
Il en va de même, concomitamment, du Fonds Vert créée par le Ministère de la Transition Écologique et de la Cohésion des Territoires au début de l’année 2023.
Ce dispositif vise à accélérer la transition écologique dans les territoires en finançant des projets présentés par les collectivités territoriales, les établissements publics de coopérations, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI, syndicats), les établissements publics locaux, les associations syndicales autorisées comportant au moins une commune ou encore les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS).
Trois grandes thématiques sont retenues pour ses projets : la performance environnementale, l’adaptation du territoire au changement climatique et l’amélioration du cadre de vie.
Et en leur sein figure un chapitre consacré aux incendies de forêt et de végétation aux termes duquel des subventions peuvent être allouées, sous réserve du respect d’une procédure, d’un cahier des charges précis, de la constitution d’un dossier complet, etc.
Retrouvant les mêmes préoccupations qu’avec la DFCI, les projets susceptibles d’être retenus dans ce domaine gravitent ainsi autour de cinq axes majeurs :
- la protection et la défense des zones déjà urbanisées contre les incendies,
- l’aménagement de la forêt aux abords des zones urbanisées,
- la mise en œuvre des obligations légales de débroussaillement par des investissements,
- la détection précoce des départs de feux, leur surveillance par des investissements,
- la connaissance, l’information préventive et le développement de la culture du risque.
C’est également, selon nous, sur cette ligne d’une gestion de politique publique pro-active qu’il convient de se situer pour comprendre, par exemple, qu’en matière de transaction immobilière le législateur vient de faire une entorse (
ce n’est toutefois pas la première) au droit de propriété - pourtant garanti constitutionnellement, « inviolable et sacré » selon l’aussi célèbre qu’important article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 - en créant un nouveau droit de préemption.
En effet, le Parlement innove en insérant, après l’article L. 131-6 du Code forestier, un article L. 131-6-1 accordant - dans un contexte bien sûr spécifique et limité - une nouvelle possibilité de préempter un bien, donc de priver un propriétaire de vendre sa propriété à qui bon lui semble et à un acquéreur d’en devenir le nouveau titulaire alors même qu’il remplit toutes les conditions légales, contractuelles et financières pour cela.
Tel est l’article 37 de la loi du 10 juillet 2023 : « en cas de vente d’une propriété classée en nature de bois et forêt au cadastre qui n’est pas dotée d’un document de gestion prévu au 2° de l’article L. 122-3 et qui est située dans un massif forestier inclus dans le périmètre d’un plan mentionné au premier alinéa du I de l’article L. 133-2, la commune sur le territoire de laquelle se trouve cette propriété bénéficie d’un droit de préemption.
La propriété acquise relève du régime forestier défini au titre Ier du livre II…».
Est ainsi dévolu aux communes la possibilité de préempter sur les parcelles forestières qui sont identifiées dans un Plan de Protection des Forêts Contre les Incendies (dit PPFCI), mais sans document de gestion durable.
L’objectif étant pour elles de rationaliser l’aménagement des forêts afin de limiter dans la mesure du possible le nombre de parcelles non gérées, plus ou moins laissés à l’abandon, et donc vulnérables au risque incendie.
Revenons alors à la Révolution française… et n’oublions pas que certes « la propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé (…) si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité » précise, bien éclairée, l’Assemblée nationale constituante… il est vrai sous l’influence des Lumières.
L’administration de l’espace, la gouvernance du collectif, en vue de la protection de ceux qui les composent (la nature et les hommes, dans des lieux devenus fragiles, sur des terres propices aux brasiers… de plus en plus nombreux et dévastateurs), n’est-ce pas là une « nécessité publique » par excellence… ?
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Avec le contrôle du feu, articulant les démarches individuelles privées contraintes (l’obligation de débroussaillement, foyer nodal du présent article), couplées à un civisme élémentaire basique, aux actions collectives et publiques transversales, c’est le vivant (la nature et l’humain), sa protection et pérennisation, qui est en jeu et s’affirme comme un enjeu.
Et de penser à Gaston BACHELARD : « Le feu est l’ultra-vivant »…, « avant d’être le fils du bois, le feu est le fils de l’homme » (in « La Psychanalyse du Feu », célèbre ouvrage de 1949, Ed. Gallimard, ici Coll. Folio/Essai, 1990, p.23 et 53).
Si celui-ci est éduqué, celui-là sera maitrisé, dans l’intérêt de tous et de chacun… du vivant pour du vivant.
Eric MASSAT - Direction de Domicilium
Eric MASSAT - Direction de Domicilium
Docteur en Droit, Expert du marché immobilier.
Fondateur et co-gérant de Domicilium. Depuis 2007 société pionnière et leader de la chasse immobilière en Haute-Garonne et Occitanie.
Ancien Avocat au barreau de Toulouse, ancien
Enseignant et Chercheur à UT1 (Université Toulouse Capitole) et à l’IEP de Toulouse.
Depuis 1993 au centre de la vie économique, sociale et culturelle toulousaine.
Publié le vendredi 01 mars 2024